Nigéria : « Parfois, nous allons nous coucher la faim au ventre deux ou trois jours d’affilée » – la faim s’aggrave tandis que les agriculteurs des régions en proie au conflit luttent pour survivre
Chaque matin, des villageois s’acheminent en longues files depuis Dikwa, un village du nord-est du Nigéria, jusqu’aux terres agricoles, souvent situées à plusieurs kilomètres de là, où ils peuvent cultiver le sol quelques heures par jour. L’agriculture de subsistance est, pour beaucoup, le seul moyen de survivre dans la région, où les emplois sont rares et où le conflit qui dure depuis seize ans a eu raison des marchés autrefois opulents.
Parmi ceux qui s’aventurent dehors chaque jour, Churi Ibrahim, un cultivateur de 70 ans, lutte pour nourrir les dix membres de sa famille avec ce qu’il fait pousser. Les petites sommes d’argent que lui rapporte le travail de confection qu’il effectue la nuit sont bien trop faibles pour acheter suffisamment à manger, car les prix sont très élevés. « Nous ne pouvons partir pour les champs qu’à 10 heures, et nous devons commencer à rentrer à midi. Certains doivent marcher trois heures pour atteindre leurs champs », raconte-t-il.
Modu Umar, un dirigeant communautaire, explique que la faim est à l’origine de nombreuses maladies. Les hôpitaux sont remplis d’adultes et d’enfants qui souffrent de diarrhées et d’autres maux dus au manque de nourriture et de médicaments. « L’agriculture est la seule solution à la faim. Nous sommes actuellement confrontés à de graves pénuries alimentaires. Les habitants sont forcés de parcourir chaque jour de longues distances à pied pour ramasser du bois de chauffage, qu’ils vendent ensuite pour acheter de la nourriture », explique-t-il. Ces récits ne se limitent malheureusement pas à Dikwa et dans tout le nord-est du pays, les communautés peignent le même tableau.
La récente inondation qui a détruit les cultures, conjuguée au déficit croissant de financements humanitaires qui entraîne une baisse substantielle du montant des aides, frappe de plein fouet une population déjà vulnérable. Dans l’ensemble des zones du nord-est du Nigéria touchées par le conflit, plus de 3,7 millions de personnes font face à l’insécurité alimentaire*.
Afin de relever ces défis et de promouvoir la résilience à long terme, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a lancé un programme de soutien aux agriculteurs pendant la saison des pluies et la saison sèche. Cette année seulement, plus de 21 000 familles ont reçu des semences adaptées aux conditions locales, ainsi que des outils qui réduiront leur charge de travail et amélioreront l’efficacité des cultures.
Diana Japaridze, cheffe du bureau du CICR à Maiduguri, explique que la fourniture de pompes d’irrigation solaires est prévue, afin que les agriculteurs puissent produire de la nourriture même pendant la saison sèche. Mais les mois à venir pourraient être particulièrement durs : « Nous nous attendons à des temps difficiles pendant la période de soudure, qui a habituellement lieu entre juillet et septembre. C’est pendant cette période que les réserves de nourriture sont consommées, et elles sont limitées. En définitive, les personnes sont obligées d’acheter de la nourriture, indique-t-elle. Malheureusement, les populations touchées par le conflit ont un pouvoir d’achat limité. Elles doivent donc réduire leur consommation alimentaire. »
Bintu Konto, une mère de cinq enfants dont le mari est décédé il y a dix ans, ramasse du bois de chauffage avec ses enfants et plante des végétaux dans un champ situé à environ une heure et demie de marche sur une route poussiéreuse. « Parfois, nous allons nous coucher la faim au ventre deux ou trois jours d’affilée, dit-elle. Et quand Dieu nous envoie quelque chose, nous avons à manger. »
** Selon le dernier rapport du Cadre Harmonisé, les États de Borno, Adamawa et Yobe (BAY) représentent 15 % (3,7 millions de personnes) de la population nigériane en situation d’insécurité alimentaire : les derniers chiffres sur l’insécurité alimentaire révèlent des menaces persistantes pour la vie de 30,6 millions de personnes | FAO au Nigéria | Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture
Informations complémentaires :
Aliyu Dawobe, Damaturu (anglais/haoussa) : adawobe@icrc.org | +234 803 953 4881
Khatija Nxedlana, Abuja (anglais): knxedlana@icrc.org | +234 703 595 4168
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) travaille dans l’État de Borno, au nord-est du Nigéria, depuis 2012. Fondé en 1863, le CICR opère partout dans le monde pour porter assistance aux victimes des conflits et de la violence armée et pour promouvoir le respect des lois qui protègent les victimes de guerre. Le CICR est une organisation neutre, impartiale et indépendante dont le mandat découle des Conventions de Genève de 1949.
LISTE DES PLANS
Durée : 05:53
Lieu : Dikwa, nord-est du Nigéria
Date de tournage : 02 et 03/07/2025
Droits d’auteur : CICR — libre de droits
Crédit à l’écran : CICR (sous forme écrite) ou logo joint au récit
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Divers — jeunes garçons menant un troupeau de moutons hors du village de Dikwa.
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Divers — regroupement de personnes sortant de Dikwa pour rejoindre leurs champs au-delà des tranchées de sécurité.
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Divers — Bintu Konto et son fils quittent leur maison du village de Dikwa en direction de leur champ.
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EXTRAIT SONORE Bintu Konto : Parfois, nous allons nous coucher la faim au ventre deux ou trois jours d’affilée. Et quand Dieu nous envoie quelque chose, nous avons à manger.
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Divers — regroupement de personnes sortant de Dikwa pour rejoindre leurs champs au-delà des tranchées de sécurité.
01:07 - 01:16
EXTRAIT SONORE — Modu Umar, dirigeant de l’association des cultivateurs à Dikwa : L’agriculture est la seule solution à la faim. Nous sommes actuellement confrontés à de graves pénuries alimentaires. Les habitants sont forcés de parcourir chaque jour de longues distances à pied pour ramasser du bois de chauffage, qu’ils vendent ensuite pour acheter de la nourriture.
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Divers — Bintu Konto et son fils quittent leur maison du village de Dikwa en direction de leur champ.
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EXTRAIT SONORE Bintu Konto : De tout le quartier, je suis la seule à sortir aussi loin.
01:38 - 01:52
Divers — Bintu Konto et son fils dans un moment émouvant EXTRAIT SONORE
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EXTRAIT SONORE Bintu Konto : Quand on traverse des bois, on a peur, bien entendu, mais en fin de compte il faut bien prendre le risque et avancer.
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Divers — personnes rentrant des champs. Certaines femmes rapportent du bois de chauffage chez elles.
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EXTRAIT SONORE Bintu Konto : Le bois de chauffage peut se vendre de 1000 à 8000 naira. On peut en garder un peu pour cuisiner et vendre le reste pour acheter de la nourriture et des graines.
02:39 - 02:54
Divers — Churi Ibrahim — cultivateur de 70 ans en train de creuser.
02:54 - 03:07
EXTRAIT SONORE Churi Ibrahim — cultivateur de 70 ans : Actuellement, c’est très difficile. Nous ne pouvons partir pour les champs qu’à 10 heures, et nous devons commencer à rentrer à midi. Certains doivent marcher trois heures pour atteindre leurs champs.
03:07 - 03:16
Churi Ibrahim — cultivateur de 70 ans en train de creuser.
03:16 - 03:22
EXTRAIT SONORE Bintu Konto : La raison pour laquelle notre champ est si éloigné est qu’il n’y en a pas de disponible plus près. C’est pour ça que nous devons y aller même si c’est loin.
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En fin de compte, on y va parce qu’on n’a pas d’autre choix que de cultiver.
03:26 - 03:29
Parce qu’après la saison des pluies, si vous n’avez pas cultivé, vous n’aurez rien à manger.
03:29 - 03:34
Ainsi, même si ce n’est pas grand-chose, on est obligé de se mettre à l’agriculture.
03:34 - 03:51
Divers. Enfants présentant des symptômes de malnutrition pris en charge dans une zone de triage de la clinique X, village de Dikwa.
03:51 - 04:15
EXTRAIT SONORE : Diana Japaridze, cheffe du bureau du CICR à Maiduguri — Nous nous attendons à des temps difficiles pendant la période de soudure, qui a habituellement lieu entre juillet et septembre. C’est pendant cette période que les réserves de nourriture sont consommées, et elles sont limitées.
En définitive, les personnes sont obligées d’acheter de la nourriture.
04:15 - 04:31
Malheureusement, les populations touchées par le conflit ont un pouvoir d’achat limité. Elles doivent donc réduire leur consommation alimentaire. En fin de compte, cela entraîne des conséquences sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle.
04:31 - 05:29
Divers. Plans de marchés à Dikwa.
05:29 - 05:53
Divers — Femmes portant du bois de chauffage, rentrant de leurs champs à l’extérieur du village de Dikwa.
Fin